vendredi 11 mars 2016

le fichier de l'EI de Sky News truffé d'incohérences

Nombre d'experts émettent de sérieux doutes sur l'authenticité des documents concernant les 22 000 membres de l'organisation État islamique que la chaîne d'information britannique Sky News prétend posséder. Décryptage.

Des expressions approximatives, un logo douteux, des formulations fallacieuses… L’authenticté desdocuments que la chaîne d'information Sky News affirme posséder concernant les noms de 22 000 membres de l'organisation État islamique (EI) est remise en cause par de nombreux experts.
Le journaliste de France 24 et spécialiste du jihadisme Wassim Nasr a notamment recensé jeudi 10 mars un nombre important d’incohérences d’après un même document diffusé sur une chaîne d’information arabe. Le journaliste évoque tout d’abord le nom arabe de "l'État islamique d'Irak et de Syrie" qui est un ancien nom de l'EI. Le nom de l’organisation est ainsi écrit de deux manières différentes et le dossier sur les morts utilise le terme "date du décès" au lieu de la phraséologie jihadiste de "martyr".

Wassim Nasr relève également l’expression "responsable des frontières", apposée sur le document, qui n’a aucun sens, selon lui, car les membres de l'EI ne reconnaissent justement pas les frontières.
Ce dernier indique également la présence d'un tampon, censé être le gage de l’authenticité du document, qui ressemble davantage à un logo récupéré sur une vidéo diffusée par l’EI.
"Vendre ces infos"
L’expert français estime, en outre, sur Twitter que "peut-être certaines informations sont vraies, mais qu'une mise en page a été fabriquée pour vendre ces informations à un prix élevé à différents clients".
La chaîne britannique a affirmé mercredi que ces documents, qui avaient fait l'objet d'un article deux jours auparavant par le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung, comportent selon elle les noms de 22 000 membres de l'EI venant de 51 pays et des informations personnelles sur ses recrues, lui avaient été fournis par un jihadiste déçu.
"Quand j'ai vu dans le passé de telles incohérences, il s'agissait en fait de faux mal faits", a assuré de son côté Romain Caillet, expert des mouvements jihadistes. Charlie Winter, chercheur à la Georgia State University, juge de son côté "bizarres" les différents noms de l'EI, le logo et les erreurs grammaticales.
"Probablement authentiques" pour la police allemande
D'après Dalia Ghanem-Yazbeck, chercheur au centre Carnegie pour le Moyen-Orient à Beyrouth, ces fiches "apparaissent moins élaborées" que des documents rendus public dans le passé.
Mais les erreurs grammaticales et autres bizarreries qu'on y trouve peuvent s'expliquer par le fait qu'elles "remontent à la fin 2013, au moment où l'EI commençait à établir son État" et sa bureaucratie, précise-t-elle à l'AFP. Si ces dossiers se révélaient authentiques, poursuit Mme Ghanem-Yazbeck, leur fuite serait préjudiciable à la réputation de l'EI, car elle montrerait son "incapacité à protéger de tels documents".
La police allemande indiquait jeudi que les listes de combattants allemands de l'EI étaient "probablement authentiques".

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